L’adaptation des anti-TNF sur des paramètres pharmacocinétiques (taux sérique résiduel) et d’immunogénicité (présence d’anticorps anti-médicaments), ou « therapeutic drug monitoring » en anglais (TDM), a démontré un certain bénéfice en cas de perte de réponse à un anti-TNF (TDM réactif).
Son implémentation en pratique clinique fait néanmoins l’objet d’une controverse dans le cadre d’une attitude proactive (TDM proactif). Plusieurs études randomisées et contrôlées n’ont pas permis de montrer le bénéfice d’une attitude proactive par rapport à l’attitude conventionnelle basée uniquement sur l’évaluation clinique et les biomarqueurs de l’inflammation. Récemment un consortium norvégien a mis en place deux grandes études contrôlées et randomisées évaluant ces deux stratégies et l’infliximab, en regroupant différentes affections inflammatoires gastroentérologique (maladie de Crohn et RCH), rhumatologique (polyarthrite rhumatoïde et spondyloarthrites) et dermatologique (psoriasis et rhumatisme psoriasique) (NOR-DRUM A et B). L’étude d’induction s’est avérée négative après 6 mois de suivi (30 semaines).
Dans cette deuxième étude, le but était d’évaluer la supériorité du TDM proactif par rapport à une attitude conventionnelle chez des patients traités par infliximab en entretien. Les patients de 20 centres hospitaliers Norvégiens traités par infliximab en entretien depuis au moins 30 semaines et au maximum depuis 3 ans, étaient ainsi inclus. Une randomisation en bloc a été réalisée avec stratification selon le type d’affection inflammatoire, la participation à l’essai NOR-DRUM A et la réalisation d’un dosage de la concentration résiduelle d’infliximab sur les 3 derniers cycles. La concentration résiduelle de référence devait être comprise entre 3 et 8 µg/mL. Des dosages de la concentration résiduelle d’infliximab étaient réalisés avant chaque perfusion. Le traitement par infliximab pouvait être optimisé par l’investigateur selon l’évolution clinique et/ou biologique, pour le groupe attitude conventionnelle. Il pouvait l’être dans le TDM proactif si la concentration résiduelle d’infliximab n’était pas satisfaisante. L’optimisation se faisait alors selon un algorithme consultable via internet. Le critère de jugement principal était un critère composite de maintien en rémission à 52 semaines basé sur l’absence de rechute définie à partir de différents scores et indices validés pour chaque affection inflammatoire et/ou l’absence d’intervention thérapeutique.
Dans cette étude, 227 patients ont été inclus dans les groupes TDM proactif et attitude conventionnelle (dont un peu moins d’un tiers de MICI et de spondyloarthrites). Les populations d’études étaient équilibrées entre les deux groupes. La durée médiane de traitement par infliximab avant l’inclusion était de 40 semaines. Un peu plus de la moitié des patients étaient traités de façon concomitante avec un immunosuppresseur. Après 52 semaines de suivi, le groupe TDM proactif présentaient un taux de maintien en rémission significativement plus élevé que le groupe attitude conventionnelle (73,6 % vs 55,9 %) avec un hazard ratio de 2,1 [1.5-2.9] en faveur du groupe TDM proactif. Paradoxalement, l’optimisation de l’infliximab était plus fréquente dans le groupe attitude conventionnelle (51,0 % vs 31,6 %). La dose-poids d’infliximab était similaire dans les deux groupes était similaire dans les deux groupes bien que la variance de la dose-poids d’infliximab soit significativement plus faible dans le groupe TDM proactif. A la semaine 52, il n’existait pas de différence au niveau des paramètres cliniques et biologiques d’activité des affections inflammatoires entre les groupes attitude conventionnelle et proactif. Il n’existait pas non plus de différences concernant le taux d’interruption de l’infliximab. Concernant la tolérance, il n’existait pas de différence sur le taux d’événements indésirables et d’évènements indésirables sévères bien qu’une discrète augmentation du risque infectieux soit noté.