Du nouveau dans la pochite chronique
Société Savante des Maladies et Cancers de l'Appareil Digestif

Domaine concerné
Thérapeutique

Degré d'innovation
Important

Avancement
Validé

Impact patient

Impact soin
Important

Intérêt

Arrivée dans la pratique
Immédiat

Rédacteur
Professeur Xavier TRETON

Enthousiasme

À la une 09/05/2023

Du nouveau dans la pochite chronique

Près de la moitié des patients atteints de rectocolite hémorragique (RCH) qui subissent une coloproctectomie avec anastomose iléale-anale (AIA) auront par la suite au moins un épisode de pochite, et parmi eux, un cinquième aura une pochite chronique.

 

Le traitement des pochites chroniques, antibio-résistantes ou antibio-dépendantes, est difficile, et rares sont les essais randomisés permettant d’appuyer les stratégies thérapeutiques.

 

Il s’agit ici d’un essai industriel randomisé de phase 4, en double aveugle, évaluant le védolizumab chez des patients souffrant d’une pochite chronique compliquant une AIA pour RCH. Les patients ont été assignés (dans un rapport 1:1) pour recevoir du védolizumab par voie intraveineuse à une dose de 300 mg ou un placebo aux semaines 0, 2, 6, 14, 22 et 30. Tous les patients ont reçu de la ciprofloxacine concomitante durant les 4 premières semaines de l’essai. Le critère d'évaluation principal était la rémission évaluée à 14 semaines et définie un indice d'activité de la pochite modifié (mPDAI) ≤ 4 et une réduction par rapport au départ de ≥ 2 points. Le mPDAI est un score composite comprenant des symptômes cliniques et des lésions endoscopiques. Parmi les critères secondaires, la réponse et la rémission ont été évaluées à 34 semaines. Parmi les 102 patients randomisés, le taux de rémission définie par le mPDAI à la semaine 14 était de 31 % avec le vedolizumab et de 10 % avec le placebo (soit une différence de 21 points; 95 % [IC], 5 à 38 ; P = 0,01). Des différences numériques mais non significatives en faveur du védolizumab par rapport au placebo ont également été observées en ce qui concerne la rémission définie par le mPDAI à la semaine 34 (différence de 17 points; IC à 95 %, 0 à 35), et la réponse à la semaine 34 (différence de 22 points de pourcentage ; IC à 95 %, 2 à 40). Des événements indésirables sévères sont survenus chez 3 des 51 patients (6 %) du groupe védolizumab et chez 4 des 51 patients (8 %) du groupe placebo.

 

En conclusion, cet essai démontre qu’un traitement par védolizumab est plus efficace que le placebo pour induire une rémission chez les patients atteints de pochite chronique compliquant une AIA pour RCH, et que la rémission est observée chez 35 % des patients à 34 semaines contre 18 % dans le bras placebo (NS).
 

Commentaires
 

Cet essai est important car peu de traitements ont été évalués avec un niveau de preuve élevé, comme ici, dans la situation particulièrement difficile de la pochite chronique.

 

La population de l’essai est représentative de cette complexité, puisqu’ils avaient au moins eu 3 épisodes de pochites nécessitant des antibiotiques dans l’année précédent l’inclusion et que près de 30 % étaient en échec d’anti-TNF après la coloproctectomie. Les résultats du traitement par védolizumab en induction de la rémission à 14 semaines sont importants et significatifs par rapport au placebo. Ceux de la réponse et de la rémission à 34 semaines restent numériquement supérieurs au placebo, mais non significatifs en raison d’un probable manque de puissance de l’essai pour cet objectif. Notons ici, qu’il n’y a pas d’élimination des non-répondeurs à l’induction, pour évaluer la rémission à plus long terme, comme dans les essais de phase 2 et 3, et qu’il s’agit donc d’un bon résultat à long terme. Enfin, les données de cicatrisation du réservoir sont également positives avec des taux de cicatrisation complète à 14 et 34 semaines de respectivement  21 % et 23 % sous védolizumab contre moins de 10 % des patients sous placebo à ces deux échéances.

 

Les limites de l’étude sont les suivantes : l’utilisation du mPDAI qui n’est pas un score validé, l’absence de relecture centralisée et objective des endoscopies, et un nombre significativement plus élevé de patients du bras traité par védolizumab ayant reçu des antibiotiques durant l’essai après les 4 semaines sous ciprofloxacine. Notons que la prise d’antibiotiques ne définissait pas un échec du traitement de l’étude, ce que l’on peut discuter. Enfin, l’optimisation du traitement n’était pas autorisée, et cette donnée serait intéressante pour la pratique quotidienne.

 

Cet essai valide donc l’utilisation du védolizumab dans la pochite chronique.

Références
 
Titre :

Du nouveau dans la pochite chronique

Titre original :

Vedolizumab for the Treatment of Chronic Pouchitis

Auteurs :

Simon Travis, Mark S Silverberg, Silvio Danese, Paolo Gionchetti, Mark Löwenberg, Vipul Jairath, Brian G Feagan, Brian Bressler, Marc Ferrante, Ailsa Hart, Dirk Lindner, Armella Escher, Stephen Jones, Bo Shen ; EARNEST Study Group

Source(s) :

Article

Revue :

New England Journal of Medicine

Références biblio. :

N Engl J Med. 2023 Mar 30;388(13):1191-1200. doi: 10.1056/NEJMoa2208450.

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